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ALBERT ROUSSEL magnifique professeur d’énergie

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Albert Roussel est né à Tourcoing (nord de la France) le 5 avril 1869, dans une famille d’industriels, par ailleurs assez portée sur les arts de façon amateur. Âgé de seulement un an, il perd son père, puis sa mère quelques années plus tard, tous deux emportés par la tuberculose. Orphelin, il est recueilli par son grand-père Charles Roussel-Defontaine, maire de la ville, puis par son oncle Félix Réquillart.

Il étudie à l’Institution libre du Sacré-Cœur de Tourcoing, et reçoit ses premières leçons de piano alors qu’il est âgé d’onze ans. Le garçon développe très vite un intérêt pour…(…la musique, pensez-vous ? Perdu !) les mathématiques. Influencé par sa lecture des romans de Jules Verne, il se décide ensuite à commencer une carrière de (musicien ? re-perdu !) marin.

Vie de mer

Après des études au collège Stanislas de Paris, il intègre donc l’École navale en 1887, sert entre 1889 et 1890 à bord de la frégate Iphigénie, et passe quelques temps en Cochinchine (et non en Tauride). Toutefois, il continue de pratiquer la musique pendant ses temps libres.

Voyages et exotisme

Cette première carrière influencera son œuvre en teintant beaucoup de ses compositions d’un exotisme lointain. Son voyage de noces aux Indes et au Cambodge, après son mariage avec Blanche Preisach en 1908, lui inspirera quant à lui son opéra-ballet Padmâvatî (composé entre 1913 et 1918, créé en 1923) et son triptyque symphonique avec solistes et chœur Évocations (1910-1911 ; écouter Aux bords du fleuve sacré, dernier volet du triptyque).

Ce cas de marin-musicien n’est pas inédit en France à cette époque : citons par exemple Jean Cras et Antoine Mariotte (qui a également servi sur l’Iphigénie et qui présentera Vincent d’Indy à Roussel).

Roussel ne sert cependant dans la marine que quelques années : il démissionne en octobre 1894 pour changer de cap et devenir musicien. Les organistes Léon Boellmann et Jules Stolz, qui l’avaient lors de ses études à Paris familiarisé avec certains grands maîtres (Johann Sebastian Bach, Wolfgang Mozart et Ludwig van Beethoven), n’y sont probablement pas pour rien.

Carrière musicale

Albert Roussel décide donc d’approfondir ses connaissances musicales, en suivant à Roubaix les cours d’harmonie de Julien Koszul (grand-père d’Henri Dutilleux et directeur de l’École nationale de musique de la ville), qui lui conseille de développer son grand potentiel à Paris. C’est chose faite auprès d’Eugène Gigout (1844-1925) à Paris, qui apprend au jeune homme le contrepoint et la fugue.

En 1898, il intègre la Schola Cantorum, où il étudiera jusqu’en 1908 (élève notamment de la classe d’orchestration de d’Indy), y exerçant en parallèle en tant que professeur de contrepoint à partir de 1902 et jusqu’à la veille de la Première guerre mondiale. Parmi ses élèves, on trouvera notamment Erik Satie, Edgar Varèse, Guy de Lioncourt, Jean Henry, Lucien Lambotte, Marcel Orban, Paul Le Flem, Roland-Manuel, Stan Golestan ou encore Ladislas de Rohozinski.

En 1904, après avoir écrit sa première œuvre pour orchestre (Résurrection, créée par Alfred Cortot cette même année), il compose sa Symphonie n° 1. Entre 1912 et 1913, il compose son célèbre ballet-pantonyme Le Festin de l’Araignée, qui reçoit un très bon accueil lors de sa création à Paris le 3 avril 1913 et qui le rend célèbre (écouter la fin, dirigée par la compositeur et suivie de quelques mots de lui-même).

L’après-guerre : « un professeur d’énergie »

Réformé de l’armée pour raisons de santé en 1902, Roussel ne peut, lorsque la guerre éclate, rejoindre le front. Il sert donc pour la Croix-Rouge, puis comme ambulancier, et continue de composer. À la fin du conflit, son succès grandissant depuis Le Festin de l’Araignée lui permet de s’acheter une maison de vacances à Varengeville-sur-Mer (près de Dieppe, en Normandie), et de se consacrer davantage à la composition. Il devient également un professeur particulier très demandé et qui influence nombre de jeunes musiciens de l’époque : Bohuslav Martinů lui dédicacera sa Sérénade pour orchestre de chambre en 1930 ; Georges Auric le considère comme "un magnifique professeur d’énergie".

À l’occasion de son soixantième anniversaire en 1929, on joue certaines de ses œuvres (dont le Psaume LXXX composé l’année précédente) au cours de trois concerts parisiens, ainsi qu’un Hommage à Albert Roussel, recueil de pièces pour piano écrites par différents compositeurs dont Ibert, Francis Poulenc et Honegger.

En 1930, il est à Boston, aux États-Unis, pour assister à la création de sa Symphonie n° 3 op. 42 par Serge Koussevitzky (écouter). L’année suivante, son ballet Bacchus et Ariane est créé à Paris, et en 1935, c’est Aeneas qui est créé à Bruxelles.

Albert Roussel meurt le 23 août 1937 à Royan, où il était parti se reposer d’un malaise cardiaque survenu à Paris, et est enterré à Varengeville-sur-Mer.

Œuvre

Ses premières œuvres comme Le Festin de l’araignée op. 17 (1913 : écouter un extrait) sont de couleur impressionniste. Puis il trouve peu à peu son style : « Une musique voulue et réalisée pour elle-même ... affranchie de tout élément pittoresque et descriptif. » (note Roussel 1). C’est par exemple la Suite en fa (1926 : écouter le début).

Il adopte volontiers des formes anciennes : 3 sonates, 2 trios, 1 quatuor, 2 suites, 1 concerto, 4 symphonies. Cependant, il veut élaborer une œuvre en prise avec son temps : « ... les changements survenus dans nos mœurs, l’énergie remise en honneur, allant parfois jusqu’à la brutalité, l’évolution des arts plastiques, l’invasion du machinisme, tout cela commandait en quelque sorte à la musique son orientation nouvelle... » (note Roussel 2). Sa Symphonie n° 3 (1930 : écouter le scherzo) illustre parfaitement son projet : « ... un retour à des lignes plus nettes, les traits plus fortement accusés, un rythme plus vigoureux, ... une polytonalité qui, sous la dominance d’un ton original bien établi, met en mouvement des dessins qui lui sont étrangers et les entrelace en habiles contrepoints... » (in idem)

Ainsi, cette symphonie trouve parfaitement sa place parmi les œuvres qui lui sont contemporaines : la Symphonie n° 3 de Sergueï Sergueïevitch Prokofiev (1928 : écouter le 3e mvt), la Symphonie de psaumes d’Igor Stravinski (1930 : écouter le 1er mvt) ou le Concerto pour piano n° 2 de Bartók (1931 : écouter le 1er mvt).

Roussel a aussi composé de nombreuses mélodies pour chant et piano et de la musique de chambre. Son œuvre la plus célèbre reste son ballet Bacchus et Ariane (1930 : écouter un extrait), évocation sensuelle du monde antique, fort prisée à l’époque. 

On peut décrire Roussel comme ayant subi de nombreuses influences contradictoires, balancé entre celles de César Franck et de d’Indy (Sonate pour violon, Trio, Poème de la Forêt) et celle de l’impressionniste Achille Claude Debussy (Le Festin de l’Araignée, Évocations). À sa sortie de l’influence impressionniste, avec par exemple Padmâvatî et sa Deuxième Symphonie (1921), il divise la critique par ses audaces.

Catalogue des œuvres et analyses sur Wikipedia

Un langage très personnel

Albert Roussel s’est donné entièrement à la musique. Son expérience de marin ainsi que ses nombreux voyages font de lui un grand contemplateur. A l’opposé des compositeurs romantiques où la musique déborde de grands sentiments, Roussel était un homme réservé et pudique mais doté d’une fabuleuse imagination. S’il fut dans un premier temps influencé par Debussy et son maître d’Indy, il trouve rapidement son langage personnel caractérisé par des mélodies amples aux lignes courbes, des harmonies raffinées et des rythmes accentués. Le compositeur avait le goût des œuvres bien construites où la musique se satisfait à elle-même. (source : Médiathèque de la Cité de la musique)

Paul Landormy dira de lui dans l’hommage qu’il rédige en 1938 : « Albert Roussel est quelque chose comme un Debussy formé à l’école du contrepoint. Rien de plus curieux ni de plus savoureux que le contraste perpétuel entre une sensibilité très vive, très mobile, une imagination très fantaisiste et la rigidité des cadres dans lesquels l’une et l’autre s’expriment. »

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