Elle est née il y a 167 ans, le 22 avril 1858… la compositrice britannique Ethel Smyth a mis l’engagement et la lutte pour les droits des femmes au cœur de sa vie et de son œuvre musicale. L'une de ses œuvres les plus célèbres en témoigne : sa Marche des femmes.
Rares sont les musiciens et les musiciennes à avoir marqué l’histoire musicale et politique de manière aussi remarquable qu’Ethel Smyth. Elle fut la première femme acceptée au conservatoire de Leipzig en 1877. La première femme à voir l’un de ses opéras monté par le Metropolitan Opera of New York en 1903. Elle fut aussi une figure incontournable des suffragettes, ces militantes qui luttaient pour obtenir le droit de vote au Royaume-Uni. Ethel Smyth était l’une d’entre-elles. C’est pour elles qu’elle compose son oeuvre la plus célèbre : La Marche des femmes (1910).
Cet hymne fut également joué plusieurs fois en concert et notamment le 23 mars 1911 sur la scène du Royal Albert Hall. Il résonna aussi dans la prison d’Holloway à Londres en 1912. Le chef d’orchestre Thomas Beecham avait été étonné d’entendre cette oeuvre entonnée par des suffragettes enfermées et de voir Ethel Smyth diriger cette oeuvre depuis sa cellule en marquant les temps forts avec une brosse à dent…
Grâce aux concerts publics et aux nombreux arrangements d’Ethel Smyth, la marche des femmes permit aux suffragettes d’accroitre leur audience et de lever des fonds importants pour continuer leur combat. Ethel Smyth en réalisa de nombreux arrangements et cita même cette marche dans l’ouverture de son quatrième opéra The Boatswain's Mate composée en 1914.
Comme l’avait voulu Ethel Smyth, la Marche des femmes a changé le regard des suffragettes sur la musique considérée alors par certaines militantes comme un art bourgeois et le symbole de l’assujettissement des femmes. Cette marche est aussi devenue universelle. Ainsi, il a paru tout naturel à Alexandre Desplat de citer discrètement l’introduction de ce chant dans la bande originale écrite pour le film Les Suffragettes de Sarah Gavron, sorti en 2015
Elle est née à Londres le 22 avril 1858.
À l’âge de 12 ans, Ethel veut devenir compositrice, ce que ses parents refusent. Pourtant, à 19 ans, elle réussit à intégrer l’école de musique de Leipzig. C’est pour elle l’occasion de rencontrer Clara Schumann, Johannes Brahms ou encore Piotr Illitch Tchaïkovski qui l’encourage et lui reconnaît un grand talent, louant sa sonate pour violon.
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Poursuivant son voyage en Europe, c’est à Florence qu’elle rencontre Henry Brewster, un écrivain qui lui écrira plusieurs livrets d’opéra.
En 1890, elle regagne l’Angleterre où l’on crée sa Sérénade en ré majeur.
En 1893, elle fait jouer sa Messe en ré au Royal Albert Hall.
En 1898, elle donne son premier opéra, Fantasio, d’après l’œuvre d’Alfred de Musset. Suivront en 1902 La Forêt (Der Wald) qui deviendra l’année suivante le premier opéra écrit par une femme monté au Metropolitan Opera. En 1909, le grand chef d’orchestre Sir Thomas Beecham monte The Wreckers (les Naufrageurs), créé à Leipzig en 1906.
En 1910, Ethel Smyth se rapproche des mouvements féministes anglais et elle devient suffragette. Elle écrit pour ce mouvement la Marche des femmes (The March of the Women).
En 1912, suite à une manifestation de rue où on lui reproche d’avoir cassé la fenêtre d’un secrétaire d’État, elle est condamnée à deux mois de prison, ce qui nous vaut l’anecdote d’Ethel Smyth faisant chanter sa Marche des femmes par un chœur de prisonnières, elle-même dirigeant de la fenêtre de sa cellule avec une brosse à dents.
En 1922, ses talents musicaux sont récompensés par le grade de Dame Commandeur de l’ordre de l’Empire britannique.
Elle cesse de composer et se met à l’écriture vers 1930, quand elle se rend compte qu’elle devient sourde. En 1939, elle tombe amoureuse de Virginia Woolf avec qui elle correspondra jusqu’au suicide de cette dernière en 1941.
Ethel Smyth est morte à Wokey le 8 mai 1944, à l’âge de 86 ans.